Après 1678

Époque Révolutionnaire

1913-05

Malgré la vaillance et l’héroïsme des défenseurs de la Province, les de Lesay, de Maisod, de Mandre, et Lacuzon, pour ne citer que ceux de la région, La Franche-Comté était conquise. La paix de Nimègue l’annexa à la France.
« Le dit seigneur très-chrétien (Louis XIV), retiendra et demeurera saisi et jouira effectivement de tout le Comté de Bourgogne, appelé la Franche-Comté et des villages, places et pays en dépendant, y compris la ville de Besançon et son district. » Art XII du traité. Cette réunion ,dont nous sommes si fiers, puisqu’elle nous a uni à la noble et toujours chrétienne nation Française, a été l’une des plus douloureuse épreuves qu’aient eues à subir dans le cours des siècles, les cœurs Comtois. »

La Franche-Comté, durant les longs siècles où elle avait fait partie du Saint-Empire ou de la monarchie espagnole, avait joui d’une indépendance complète ou presque complète.
L’Espagne la possédait moins qu’elle n’empêchait la France de la posséder Nos pères étaient gouvernés en réalité par le parlement de Dôle et par les seigneurs locaux. Les états généraux se réunissaient tous les deux ou trois ans, ils votaient les impôts, faisaient les représentations au souverain, délibéraient sur toutes les affaires importantes de la Province.
Durant le Moyen-Age, la Franche-Comté n’avait pas payé d’impôts au Saint-Empire. Dans les derniers temps, elle accordait au roi d’Espagne un don gratuit, mais ce don rappelait par son nom même, qu’il était une concession, librement votée par les Etats, il devait au reste être employé dans la Province, pour l’entretien des places de guerre et autres nécessités du pays.
Cette noble indépendance, ces franchises si amples, étaient chères au cœur de tout Comtois. Aussi après la conquête, malgré les réjouissances commandées par les officiers de Louis XIV, nos pères pendant plus de cent ans, pleurèrent leurs libertés perdues et demeurèrent antipathiques à la France. Ils chantèrent le Te Deum, forcé, mais un grand nombre prirent le chemin de l’exil

Le célèbre partisan Lacuzon s’exila à Milan, où il mourut le 21 décembre 1681, âgé de 74 ans. Citons encore deux autres Comtois, nous touchant de plus près, qui préférèrent la terre d’exile, plutôt que de se soumettre à Louis XIV.Ce furent deux frères des abbé Jacques et Philibert Dunod, successivement Curés de Soucia et par le fait d’Estival, de 1654 à 1687.
-le premier messire Antide Dunod, curé de Saint-Maurice de Besançon, puis curé de Saint-Maur (Jura), de 1658 à 1675, pris la route de la Bohême, devint évêque de Vidin, sur le Danube, et mourut à Prague, dans la charge de premier conseiller à la cour de l’Empereur.
-le deuxième, dont on ignore le nom, partit pour Vienne, ou il se distingua au point de gagner lui aussi l’affection de l’Empereur. A l’investissement de la ville par le Sultan, il refusa d’en sortir son courage et son intrépidité sur les champs de bataille, lui méritèrent le surnom de Fléau des Turcs. Tué d’un coup de mousquet, il offrit son sang pour le triomphe de l’armée chrétienne.
Trois autres frères, de la même famille Dunod, pour n’avoir pas acclamé le vainqueur de la Franche-Comté, furent saisis et jetés en prison savoir :
-Le R.P Etienne Dunod de l’oratoire, confesseur des Clarisses de Poligny, fut le 5 janvier 1691, enlevé de force par les archers royaux et traîné à Lyon.
-Le P.Augustin Dunod, capucin, fut de même conduit à Pont-saint-Esprit.
-Le P. Pierre joseph Dunod, jésuite, fut interné à Poitiers.
Les Clarisses de Poligny, qui eurent pour Abbesse, la R.M. Huberte-Françoise Dunod, sœur des précédents, travaillèrent de toutes leurs forces à l’élargissement des trois prisonniers, et elles y parvinrent par l’entremise du P. de la Chaise, confesseur du Roi et de l’intendant de Franche-Comté, le 23 janvier 1693 ils furent en effet remis en liberté.

On comprend facilement que le plus grand nombre, que la multitude des vaincus, ne purent prendre le chemin de l’exil, et demeurèrent dans la Province, mais pour manifester à leur manière leur attachement à la Comté,  » Ils se faisaient enterrer la face contre terre, pour ne pas voir le soleil de Louis XIV. »
Quelle leçon de patriotisme pour les antimilitaristes et internationalistes de notre époque.
Maître de la Franche-Comté, Louis XIV s’appliqua à y établir le régime centralisé de la France, et à ruiner les institutions qui pouvaient entretenir dans les Comtois le souvenir de leur vieille indépendance, Il plaça à la tête de la Franche Comté un intendant, qui avait dans la province les mêmes pouvoirs que le roi de France. Le parlement de Dôle, transféré à Besançon, ne compta plus. Les Etats Généraux de la province, furent supprimés. La domination Française se fit remarquer par l’augmentation des impôts. Les Français, répartis en vingt-deux classes, payaient tous l’impôt personnel, appelé capitation. Les Francs-Comtois y furent assujettis.

« La capitation a monté par an, à la somme de 610.000 livres et jusqu’à 615.000 livres, toute non-valeur déduite. »
D’autres impôts vinrent peser plus lourdement encore sur la Franche-Comté : ce fut celui de la milice et celui des logements militaires. Il est aisé de comprendre que les Comtois, en comparant leurs charges nouvelles avec leurs charges anciennes, aient eu tant de peine à se résigner à la domination française. Mais depuis longtemps, heureux d’appartenir à la France, les fils des anciens preux sont fiers d’être Français. Tout en gardant au cœur l’antique souvenir.