Le château d’ Etival et Famille Maréchal.

1912-09 suite

Il n’avait rien de féodal à proprement parler, c’était une vaste maison seigneuriale bâtie par Messire de Mandre, époux de dame Claude-Françoise de Laubespin, baronne de l’Aigle, enterrée à la chapelle d’Estival, ainsi que nous l’avons dit. Il s’élevait à coté de la maison d’école actuelle, dans le jardin Berrod. Les anciens du pays en ont vu quelques ruines et d’ailleurs il reste encore quelques pierres de taille sculptées, dans le mur d’enclos. De plus, -la porte d’entrée de la maison Fernand Bouvier avec jambages moulés et son linteau portant double écusson parfaitement conservé, provient certainement des ruines du château.
CHATEAU DES MARECHAL à ETIVAL
Dès le milieu du XVII siècle, vint habiter Estival une famille originaire du Fort-du-Plâne, du nom de Maréchal. Le fondateur de cette maison à Etival, fut Henry Maréchal
 » Marchand né à Fourg-du-Plâne,et marié à Claudine-Dona Bareau, dud’ Fourg-du-Plâne; tous deux main-mortables du Grandvaux »
Lors de la levée des subsides ou impositions  » pour fourniture d’armes et entretiens des troupes de la Province de Franche-Comté, lorsqu’elle était gouvernée par le Roy d’Espagne  » Henry Maréchal fait à la Communauté d’Estival l’avance d’une partie de la somme à elle imposée.
« Par acte reçut du notaire Berrez d’Estival, le 15 Janvier 1669 et un autre du 22 Janvier 1671, aussi reçut du notaire Berrez, sont constitués deux capitaux de rente. Ils portent chacun la somme de cent livres tournois, avec des intérêts au 5% »
Henry Maréchal, « propriétaire et marchand à Estival, acheta en 1711, de delle Romanet », petite-fille de Aymé de Favier « ses terres de la Crochère et généralement toutes celles qu’elle possédait dans la Prévôté venant de son aïeule Anne de Ronchaux »

Devenu ainsi un des riches propriétaires du pays, il se voit traité dans les actes ou registres à terrier de messire, honorable personne.Il fut aussi lui et ses descendants, d’insignes bienfaiteurs d’Estival .
 » Au lieu d’Estival et le dix-septième jour du mois de décembre de l’an 1722, par devant moy, Jean-Claude Piard des Piards notaire…..C’est en sa personne constitué honorable Henry Maréchal, dud’lieu et de son authorité vouloir et exprès consentement, Claudine Barraux, sa femme….lesquels de leur bon gré pour eux leurs hoirs et successeurs, ont fondé et fondent comme ils font par cette une Bénédiction du Très-Auguste Sacrement de l’autel de l’Eglise d’Estival qui se donnerat à lissue des Vespres, le jour de l’Assomption nostre dâme, par le chapelain de la chapelle….et ensuite sera dit un liberamé ; et le lendemain ou le post lendemain, ils fondent une messe pour le repos de l’âme de feu Messire Henry Maréchal du Fourg-du-plâne, leur oncle prestre, (Vicaire chapelain d’Estival de 1678 à 1684). item ils fondent trois messes basses qui se diront et scelebreront à l’Eglise de l’Assomption nostre dâme, érigée aud’lieu d’Estival….et à la fin de chaque messe, il serat dit un Pater et un Ave ou bien un De profundis….et seront célébrées pour le repos de l’âme de feu Henry Maréchal, leur frère et beau-frère, (Vicaire-chapelain à Estival de 1695 à 1715)….De plus, ils fondent six messes basses qui se diront trois pour Henry Maréchal, fondateur desdits et trois pour Claudine Barraux, fondatrice…. et font lad’fondation en considération de la dévotion qu’ils ont à lad’Eglise bénitte…..connaissant la fluance du peuple y venire par dévotion de toute part de jour à autres ; néanmoins lad’dévotion faitte pour prier la toutte-puissance de Dieu aud’jour de vouloir colloquer leurs âmes en son royaume de paradis comme de tous leurs prédecesseurs, parans et amis….De plus, donnent lesd’fondateurs à lad’église dud’Estival une pioche et une paile de ferr pour faire les fosses des morts, pour le service de l’Eglise seulement, avec un drap noir pour mestre sur la bière des morts, avec deux livres et quinze sols d’argent qu’ils donnent aussy à lad’Eglise pour y faire quelques réparations, suivant que lesd’habitans leurs promettrons de placer dans lad’Eglise un petit banc de la longueur de cinq pied et de la largeur despuis le Confessionnal jusque au bâton du Confaron, (bannière de procession.)

10-1912

Honorable Henry Maréchal mourut le 15 octobre 1740, il avait été précédé dans la tombe par son épouse Claudine Barrau qui « trépassa le 13 et fut inhumée le 14 mars 1737, dans l’Eglise d’Estival »

Honorable André Maréchal, fils des précédents et époux de « honnette demoiselle Angèle Bayard », mourut le 6 may 1737, à l’age de 35 ans. Il avait eu de son épouse de nombreux enfants, mais les registres, nous apprennent que la plupart moururent en bas âge, Angèle Bayard fut, elle aussi une grande bienfaitrice de la chapelle et de la communauté d’Estival ; et bien que son fils Jean-Etienne Maréchal, soit le fondateur légal du bureau de bienfaisance d’Estival, on peut affirmer qu’il fit cette fondation sous l’inspiration ou recommandation de sa mère .

Jean-Etienne Maréchal, « bachelier aux droits civil, homme de loi, qui par 242 suffrages sur 259 votants, fut élu le premier des électeurs cantonaux pour la nomination d’un député à l’Assemblée législative », mourut le 6 novembre 1811, à l’age de 76 ans. Par son testament en date du 23 may 1811, il avait fondé le Bureau de Bienfaisance d’Etival; dont extrait:

« 10° Je donne aux pauvres d’Etival, deux capitaux de rente qui me sont dûs savoir : un par Claude-François Devaux de Ronchaux, par acte reçu Piard notaire le 30 mars 1738, et renouvelé en 1808, portant la somme de 200 livres, ce dernier a été passé par Jean-Marie et François-Marie Devaux.- L’autre rente dûe par Claude-Joseph Bouvier, d’Etival, par acte de notaire Richerateau en 1776 renouvelé en 1808, par Antoine et Gérard Bouvier en principal de 800fr »

Sommes qui dans la suite furent versées entre les mains des administrateurs du Bureau de Bienfaisance et constituent le principal de la susdite fondation.

Jean-Etienne Maréchal était mort sans laisser d’enfants ; s’il en eut de son épouse Delle Reymondet, ils l’avaient précédé dans la tombe.

l’héritière de sa maison et de ses biens fut Melle Sophie Buffet de Saint-Claude, sa parente par les Bayard ou les Reymondet. La maison château des Maréchal appartient actuellement à Mme Laurence de Chaillé, veuve du Colonel Alphée Buffet, petit neveu de Melle Sophie Buffet.

Elle est toujours la maison de bienfaisance. Sur le linteau de la porte d’entrée se voit l’écusson des Maréchal avec armes parlantes : Clous et fers-à-cheval.

Maintenant que j’ai mis sous les yeux du lecteur la liste aussi complète qu’il m’a été possible, des Seigneurs, Abbés et Laïcs d’Etival et Ronchaux, ainsi que les principaux faits les concernant, qu’on me permette quelques réflexions.

D’aucuns quand ils abordent le chapitre féodalité ne peuvent se défendre de représenter les seigneurs comme d’impitoyables tyrans, gouvernant par le fouet et pour le moindre délit, jetant en de sombres cachots, ou pendant haut et court leurs serfs et manants. Je l’ai dit déjà, je n’ai pas la prétention d’absoudre la féodalité des abus qu’elle a pu commettre; qu’on veuille bien citer une époque où il n’y ait pas d’abus, Seulement il me semble que les Seigneurs d’Estival et Ronchaux n’étaient pas en si mauvaises relations avec leurs cerfs et manants pour me servir de l’expression consacrée. En dehors de ce que j’ai dit déjà, un fait ou plutôt une série de faits que nous font connaître les registres de Catholicité de la paroisse, suffirait à le prouver. En effet nous voyons les seigneurs d’Estival et Ronchaux.-les de Laubespin,-les de Lezay,-les de Mandre, de Favier de Romanet, très fréquemment parrain ou marraines d’enfants du pays ,tantôt tenant eux-mêmes les enfants sur les fonts, tantôt se faisant représenter.

Or ces nombreux parrainages que je noterai à l’article chapelle, n’indiquent-ils pas des relations amicales, bienveillantes, on pourrait dire familiales. Le paysan n’est plus le serf, l’esclave du seigneur, mais son ami, son fils spirituel. Dans ces temps malheureux de guerres, de pestes, de fléaux de toutes sortes, les pauvres habitants ruinés par le pillage et l’incendie, trouvaient toujours aide, asile et protection auprès du seigneur, leur parrain ou celui de leurs enfants.

Quand au gouvernement des seigneurs-abbés, je crois pouvoir affirmer qu’il fut bienveillant encore et surtout plus désintéressé que celui des seigneurs-laïcs. Je n’en veux pour preuve que le fait suivant dont personne ne niera l’importance. C’est que lors de l’affranchissement par l’abbé de Saint Claude, Pierre Morel 1er, en 1443, des deux communautés d’Etival et de Ronchaux, le seigneur-abbé leur donna non pas seulement la jouissance, un droit d’usage ou d’affouage, mais la possession proprement dite des forêts qui font encore actuellement la richesse de la commune.

Tandis que si les habitants de Châtel de Joux sont moins privilégiés en richesse forestière, c’est parce que le seigneur laïc de Clairvaux, ne leur avait concédé primitivement qu’un droit d’usage affouager sur certaines parties de l’immense forêt qu’il possédait dans la région et que ce fut cette partie seulement sur laquelle ils avaient des droits affouagers qui leur fut reconnue en propriété par plusieurs jugements formulés sur les réclamations qu’en plusieurs circonstances, les susdits habitants portèrent devant les tribunaux.