1921-07
Donc au cri de Liberté, la Révolution avait étouffé dans le sang la liberté elle-même.
Pour réformer les abus qui pouvaient exister, elle s’était livrée a tous les abus.
Pour renverser la tyrannie elle avait établi le règne de la Terreur.
Sous le prétexte de constituer la société sur de nouvelles bases, elle n’avait produit que ruines sans rien édifier.
Pour la considérer qu’au point de vue qui nous occupe la Constituante avait dépouillé le Clergé de ses biens. La Convention avait interdit le culte catholique, proscrit ou envoyé à la guillotine les prêtres fidèles.
Au 18 fructidor (4 sept 1979) le Directoire avait renouvelé les décrets de proscriptions et de nouveaux prêtres fidèles durent prendre la route de l’exil ou se voir jeter sur les pontons et déportés sur les rivages meurtriers de la Guyane.
Mais le coup d’état de Bonaparte au 18 brumaire (9 novembre 1799) ouvre un nouvel horizon, un air de paix va commencer. De ce jour fameux beaucoup de prêtres qui s’étaient tenus cachés avaient reparus (d’autres revenaient de l’exil.)
Le sentiment religieux longtemps comprimé par la terreur se manifestait plus ouvertement de jour en jour. Les églises s’étaient rouvertes et le culte catholique se rétablissait de lui même, tant était grande la soif des âmes.
Mais Bonaparte comprenant que le peuple français aspirait après la paix religieuse, résolut de rétablir officiellement le Catholicisme. D’aucun ont voulu voir dans cette détermination une raison purement politique, s’il on veut ; mais j’ajouterai que le, génie de Napoléon et sa foi firent voir que seule la religion catholique convenait à la France. D’ailleurs n’oublions pas cet adage toujours d’actualité « l’homme s’agite et Dieu le mène » Et il entrait dans la vue de la providence que la France redevint et restât catholique.
Des pourparlers, des négociations furent entamées avec le Pape Pie VII. Ces négociations aboutirent à la signature d’un concordat destiné à régler les rapports mutuels de l’Eglise de France et de l’Etat.
Par cet acte Bonaparte au nom de la France s’engageait à protéger le libre exercice du culte catholique à rendre au clergé les églises non aliénées à assurer aux évêques et aux curés un traitement convenable.
De son coté le Pape s’engageait à reconnaître comme définitive la vente des biens ecclésiastiques et consentait à une nouvelle division de la France en diocèses.
Le diocèse de Saint-Claude établi seulement en 1742 fut aboli. Il avait eu que 2 évêques Mgr Joseph Meallet de Fargues 1742-1785 et Mgr de Rohan Chabot 1785-1801 exilé pour la foi.
Ce dernier à la demande du Pape en 1801 donna sa démission d’évêque de Saint-Claude.
La paroisse d’Etival qui depuis son érection en 1780 et en qualité d’ancienne terre de St Oyen faisait partie du diocèse de Saint-Claude retourna sous le gouvernement de Besançon.
Mgr Lecoz signé le 26 messidor an IX (15 juillet 1801) le concordat était une restauration religieuse aussi complète que les circonstances le permettaient il réglait tout en théorie.
Mais les réorganisations des paroisses ne pouvait être l’affaire de quelques jours de quelques mois.
Aussi nous verrons plus loin que la délimitation ou la circonscription de la nouvelle paroisse d’Etival ne fut entièrement fixée qu’au mois d’août de l’année 1803.
1921-08
Nous avons vu que dès 1414, les deux communautés d’Etival et de Ronchaux avaient une chapelle avec vicaire chapelain dépendant de la paroisse de Soucia.
Puis qu’après un procès canonique de 27 ans, un décret de l’Archevêque de Besançon du 29 avril 1780, avec lettres patentes du Roi Louis XVI, de septembre et arrêt du parlement de Besançon du 18 novembre 1780, démembrait les dites communautés de l’église mère se Soucia et érigeait en titre de cure et de paroisse la chapelle d’Etival.
Le concordat de 1801 vint y ajouter la commune de Châtel de Joux.
Celle-ci sous la dépendance des seigneurs de Clairvaux, possédait également dès 1427, une chapelle avec prêtre desservant, mais faisait partie de la paroisse de Clairvaux où se faisaient les mariages, les baptêmes et même les inhumations.
Toutefois pendant la Révolution, les habitants de Châtel de Joux fréquentèrent de préférence l’église d’Etival et même en 1793, le conseil municipal prit une délibération pour demander leur démembrement de la paroisse de Clairvaux et leur rattachement à celle d’Etival.
Délibération qui n’eut pas et ne pouvait avoir de suite, car il n’appartient qu’à l’Eglise de déterminer la circonscription des paroisses, l’érection de nouvelles, le démembrement de certaine partie.
Le concordat, c’est à dire l’accord intervenu entre Napoléon chef de l’Etat et Pie VII, chef de l’Eglise, vint faire ce que le pouvoir civil seul ne pouvait accomplir : le rattachement de la commune de Châtel de Joux à la paroisse d’Etival.
Une réponse du préfet du Jura (août 1803) à une délibération du conseil municipal d’Etival nous apprend qu’à cette date le rattachement était définitif et officiel.
De ce moment donc la paroisse d’Etival se composa des sections de Etival, Ronchaux, Châtel de Joux et La Crochère.
C’est encore actuellement la constitution de la paroisse d’Etival dont nous allons continuer la monographie, considérée principalement au point de vue religieux.
Néanmoins nous noterons ce qui pourrait s’être passé d’intéressant au point de vue civil et administratif.
Comme précédemment nous ne rapporterons que les faits documentés. Il suffit de relire les considérations notées aux bulletins de Juin et de Juillet pour se rendre compte du triste état de la paroisse au 18 brumaire (9 novembre 1799). Fermée au culte, livrée au vandalisme sacrilège des salpêtriers, l’église d ‘Etival n’était plus qu’une ruine.
L’école, elle aussi dont le bulletin de Septembre 1910, j’ai dressé la liste des recteurs de 1738 à 1796, avait vu fermer ses portes, comme d’ailleurs en toute la France, sous le gouvernement de désordre de la Convention. Et notez que l’histoire faussée par la F… M… donne la convention comme la créatrice des écoles en France. Donc, pas de traces de maître d’école et d’enseignement à Etival de 1797 à 1802.
Tout était à reconstituer. Les municipalités allèrent au plus pressé, a la réparation de l’église nécessaire aux exercices du culte que réclamait la foi et les sentiments religieux de la population.
1921-09
Une délibération de l’an VIII (1800), en dépeignant le triste état de l ‘église, indique la première et la plus urgente réparation à faire : celle de la toiture qui «par la négligence du ci-devant agent de la commune est dans un tel état, que la pluie pénètre dans toute l’enceinte du temple.» Les trois communes qui composent la paroisse «demandent à l’Etat de se charger de ladite réfection, ou au refus de celui-ci, l’autorisation aux communes d’y pourvoir.»
Réponse du Préfet :
Art 1er : Refus
Art 2 : Autorisation
Les communes sans-aucun doute, firent les réparations les plus nécessaires et urgentes, mais pour rendre à l’église toute la décence nécessaire au culte et même pourvoir à la sécurité des fidèles réunis, ces réparations furent tout à fait insuffisantes.
Aussi sous l’impulsion de M. Chavériat, curé d’Etival, prêtre plein de zèle pour la maison de Dieu, comme aussi sur la demande du Conseil de Fabrique, établi d’après le décret de 1809, les communes prennent l’initiative de réparations plus importantes pouvant servir de bases à une complète restauration de la vieille église, du moins sur le plan de 1811.
C’est la délibération suivante du Conseil Municipal des Ronchaux qui nous instruit à ce sujet :
« L’an 1811, le 12 mai, dans la Chambre commune de Ronchaux, tous les membres du Conseil y étant réunis, à l’effet d’aviser aux moyens de fournir aux frais de la construction du cloché et de la nef de l’église succursale d’Etival, parce que l’un et l’autre menasse ruine, le cœur de la ditte église ayent été fait à neuf, il y a 20 ans et que, faute de moyen on n’avait pu faire la nef ni le clocher, la voûte de la nef est en bois et en danger de s’écrouler par vétusté, que d’ailleurs elle est trop petite pour contenir la population de la paroisse composée de trois communes ; que le chœur de cette église étant beaucoup plus élevé que la nef, la pluie s’y insinue entre l’arc doubleau du chœur, ce qui apporte l’humidité dans l’église et qui a occasionné la pourriture de la voûte en bois et du planché de foulé ; il n’est pas possible de sonner la cloche à la vollé parce que le massif du clocher fait autant de mouvements que la cloche et que pris égard au danger qu’il résulterait par sa chute, M. le Sous-Préfet a ordonné la descente de la cloche. L’adjoint d’Etival a dit qu’il avait fait faire un plan et devis pour l’architecte Gabiot, de Lons le Saunier, dont le montant s’élève à 11 587 Fr. ; qu’il fallait aviser au moyen que la commune peut avoir pour subvenir à sa cotte part du payement de cette reconstruction qui monte à 5 fois le montant annuel de la contribution foncière des trois communes de la paroisse. Après avoir examiné les plans et devis, le Conseil arrête que la commune de Ronchaux se chargera de fournir sa cote part de la chaux et des sables, voiturera les pierres dans la même proportion, ce qui peut être évalué au cinquième de la somme à supporter par la commune ; que celle-ci peut tirer de ses communaux 300 Fr. par an –que le surplus de la somme à employer se répartira au marc le franc des contributions foncières pour les ¾ et pour l’autre quart sur la contribution personnelle. Le Conseil espère que la pieuse générosité du Gouvernement viendra en aide à la commune.
La présente délibération sera adressée à M. le Préfet. »
1921-10
La délibération du 12 mai 1811 concernant les réparations de l’église envoyées en sous-préfecture fut retournée en Mairie avec une marge :
« Vu la présente délibération le sous préfet arrête qu’elle sera communiquée à la municipalité de Châtel de Joux pour donner ses observations sous le délais de huitaine. St Claude, 8 juin 1811. Jenevey.»
Le plan dont parle cette délibération n’existe plus, mais le devis des travaux est encore à la mairie d’Etival. Le voici à titre de curiosité.
«Le clocher adossé au frontispice de l’église d’alors devait être de 18 mètres dès le seuil à la corniche du-dessus. La nef devait être de 14 mètres 70 dès le frontispice au chœur y compris l’arc doubleau et de même hauteur et largeur que le chœur de manière à ce que la toiture soit au même niveau. Les chapelles seront enfoncées de l’alignement des murs de 1m.50, la nef et les chapelles seront voûtées. 4 vitraux ou fenêtres savoir 3 à la nef et 1 au chœur, ils seront tous de 2 mètres de hauteur.»
Le devis est signé du 6 février 1811.
Les communes d’Etival et de Ronchaux étaient d’accord sur ce projet. Mais il ne devait pas en être de même de celle de Châtel de Joux. Le conseil municipal de Châtel de Joux prit-il ou non une délibération ainsi que l’y invitait le sous préfet ? Serait-ce sur observation de sa part que fut changé le premier plan ? Toujours est il qu’un mois après la délibération notée plus haut, on décide de faire le clocher seulement.
«Il occuperait l’emplacement ci dessus du devis, et du coté de la nef on mettrait des pierres d’attente pour la nef qui se fera dans la suite.»
De ces deux projets, aucun ne fut exécuté. Le motif nous ne le savons pas. On dut faire quelques réparations absolument nécessaires et attendre que les temps ou les personnes soient plus propices. D’ailleurs on était arrivé à une époque bien bouleversée. Nos armées jusque là victorieuses, éprouvaient quelques échecs ; la gloire de Napoléon commençait à pâlir. Le commerce sans aucun doute devait s’en ressentir d’un tel état de choses, le produit des forets communales n’avait pas encore le débouché de notre temps ; les habitants sans industrie, vivaient pauvrement du produit de terres trop pauvres d’engrais. D’autre part, il n’y a pas de doute qu’un prêtre aussi zélé que M. Chaveriat ne cessât un seul instant de réchauffer la piété de ses paroissiens et ne fît tous les efforts pour faire aboutir la restauration de l’antique chapelle. La plupart des habitants témoignaient ainsi de leur bonne volonté. On ne peut donc attribuer ces retards qu’aux malheurs des temps. Toutefois, le Conseil de fabrique, par délibération du 16 avril 1820, expose aux communes la nécessité absolue de faire les réparations projetées précédemment et de pourvoir au payement des dépenses.
C’est sans doute sur cet avis que les trois maires firent le 18 janvier 1821, «en leur présence et celle du desservant, visiter l’église par l’architecte de l’arrondissement, visite approfondie qui amena pour conclusion, non point une restauration insuffisante et coûteuse, mais la reconstruction d’un nouvel édifice plus décent et plus assorti à l’étendue et aux besoins de la population. »
Aussi, le 3 février 1821, les Conseils d’Etival et de Ronchaux après l’exposé fait par les maires respectifs du résultat de la visite ci-dessus, prennent une délibération avec les considérants qui suivent.
«Considérant que l’église actuelle est trop petite, trop basse, trop humide et mal éclairée, qu’elle n’est même pas sure dans plusieurs de ses parties, que le lieu où elle est située ne permet pas de l’agrandir, que d’ailleurs en tentant de la réparer on sacrifierait inutilement beaucoup d’argent, sans lui ôter la plupart de ses défauts, que le plus sage parti est d’en faire une nouvelle dans un lieu convenable et qui offre les aisances et les commodités que réclame un édifice destiné au culte, considérant sur les moyens de faire face aux frais que les communes prendront les ressources sur la vente d’une coupe extraordinaire de sapins. Le Conseil charge le maire de l’envoi de la susdite délibération aux autorités compétentes pour assurer le succès de la demande qu’elle contient.»